De la travailleuse des champs à la femme-ouvrière
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CANUT. Le mot est très utilisé. On y associe des commerces en tout genre allant du café jusqu’au lotissement, des objets marketing qui vont de la canette porte-clefs au cendrier dévidoir en passant par le fromage…Pourtant derrière ce mot « Canut » se cachent des hommes et des femmes qui ont travaillé dur, souffert, lutté pour défendre leur droit au travail et à la dignité. Des journées de travail qui durent de 13 à 16 heures par jour et leur rémunération qui chute de moitié en quelques années opposent canuts et marchands. C’est dans ce contexte qu’éclatent 2 grandes révoltes, en 1831 et 1834. L’insurrection fera 150 morts et 500 blessés. En association avec les manifestations de novembre qui leur rendent hommage, La ficelle, à sa manière, a voulu parler du travail des femmes et mettre l’accent sur leurs conditions d’existence en esquissant quelques traits. Sans vouloir faire une thèse sur le sujet, il nous a paru intéressant de rechercher des témoignages ou récits qui retracent les conditions des femmes au XIXe et début du XXe siècle à Lyon.
. Nous avons cherché désespérément des témoins des métiers de guimpière, dévideuse, ourdisseuse, moulinière…Malheureusement ceux-ci n’ont pas forcément l’envie de communiquer ou bien ne sont plus là pour le faire. Nous avons cependant eu la chance de rencontrer Henriette qui a bien voulu nous aider dans notre démarche.
Henriette habite à la Croix-Rousse. Elle nous raconte le métier de guimpier dans l’atelier que possédaient ses parents place Croix-Paquet, dans les années 40.
« Je suis née dans la guimperie, mes parents et grands-parents ayant les uns et les autres créé leur entreprise. La guimperie va du moulinage à la dorure. L’opération consiste à enrouler autour d’un fil textile dit « l’âme » un fil de métal précieux préalablement aplati. C’est une succession de manipulations délicates pour arriver au fil le plus fin possible. Il faut changer de bobine, le fil de métal n’étant pas plat, il faut l’écraser, l’étirer, le passer du moulin au rotin, pour descendre dans le « cuillut » (le terme est introuvable dans le lexique des métiers du textile NDLR), et l’aplatir une dernière fois avant de l’envoyer chez le « fabricant ». Les métiers devaient être nettoyés régulièrement pour ne pas gêner le passage des fils d’or. Ceux-ci étaient si fins qu’ils pouvaient casser à tout moment. Le nettoyage des moulins pouvaient être faits par un homme, mais toutes les opérations de guimperie restaient un travail essentiellement féminin car il demandait de l’habileté et peu de force physique. Le travail de précision, la poussière des fils qui frottent, la graisse des machines, la station debout pendant de nombreuses heures rendaient le métier salissant et fatigant, les 40 heures n’étant pas encore d’actualité. Le métier était tributaire de la mode et du marché et pendant les périodes de chômage relativement longues, les emplois des ouvrières étaient suspendus et mon père fermait l’atelier. Les couvertures sociales étant peu développées ou inexistantes, chacun attendait le retour des commandes en faisant d’autres métiers ».
LF- c’était une entreprise familiale ?
H-« Tous les enfants de la famille rendaient des services quand il le fallait. Mon frère aîné livrait des « balles » chez le fabricant avant de partir à l’école. Quand mon père est tombé malade, j’ai dû aider ma mère à faire tourner l’entreprise. J’étais une fille. On me désigna tout naturellement pour ne pas entraver les études de médecine que poursuivait mon frère aîné. Après mon bacho , J’y ai travaillé pendant 2 ans. Je n’avais pas de spécialité, j’assurais les tâches là où le besoin se faisait sentir, en cas de maladie ou de surcharge de travail des ouvrières. Par la suite, ma mère me conseilla de ne pas continuer dans ce métier sans avenir pour moi et me poussa à continuer mes études. J’ai beaucoup de reconnaissance envers ma mère qui m’a permis de devenir pharmacien.»
LF- Comment vos parents avaient-ils appris le métier ?
H- « C’est ma mère qui était guimpière, elle avait appris le métier chez ses parents. La campagne ne fournissant plus le travail nécessaire, son père était venu « tenter sa chance » à la ville en créant son usine à Villeurbanne rue Léon Blum. Elle était de moyenne importance avec une quinzaine de métiers, une dizaine d’ouvrières qui se partageaient les tâches de stoppage, moulinage, dorure et un mécanicien (occasionnel ou à demeure, je ne saurais pas le dire). Ma grand-mère avait appris la guimperie dans un atelier place Croix-Paquet. Ma mère me montrait toujours le haut de l’immeuble où elle avait été logée, dans un dortoir attribué aux ouvrières, sous les combles de l’immeuble. C’est la seule chose que je sais d’elle ».
LF- A quel âge votre mère a-t-elle commencé à travailler?
H-« Après une scolarité chez les religieuses, elle a travaillé chez son père. Ma grand-mère était à ses côté, mais c’est lui qui dirigeait l’entreprise. Les femmes n’avaient pas leur mot à dire, c’était l’époque des femmes soumises. Ma mère a 17 ou 18 ans sur la photo faite en 1910. Sans spécialités, elle était préposée à tout. Elle a tout appris chez ses parents. C’était une femme remarquable, courageuse, discrète, travailleuse. Elle rencontra mon père par l’intermédiaire d’une ouvrière dont il était le frère. Tous deux montèrent leur atelier de guimperie sur les pentes de la Croix-Rousse. La bonne marche de l’entreprise nécessitait le travail à plein temps de ma mère qui fut obligée de mettre ses enfants en nourrice. Elle espérait pouvoir gagner suffisamment d’argent pour avoir une nourrice à demeure mais la venue d’un quatrième enfant l’en empêcha. Il fallait « travailler plus pour ne pas gagner moins ». Elle a beaucoup souffert et culpabilisé de devoir s’en séparer. Les nourrices n’étaient pas toujours de «bonnes nourrices » et beaucoup d’enfants mourraient faute de soins. Mon frère aîné a failli faire partie de l’un deux ».
Les remarques d’Henriette nous interpellent. Qu’en était-il des ateliers-dortoirs qu’a connus sa grand-mère ainsi que le taux de mortalité infantile en rapport avec les nourrices ?
Nous avons voulu en savoir plus.
DES ATELIERS-DORTOIRS AUX USINES-PENSIONNATS
Au XIXe la France est encore en grande partie rurale. Les femmes ont toujours travaillé, elles s’occupent des travaux ménagers, de la basse-cour, de la fabrication du pain, du beurre et du fromage, et travaillent aussi aux champs lors des fenaisons, moissons, ramassages des betteraves, vendanges. A cela s’ajoutent des travaux à domicile de tissage, passementerie, broderie…Menés de front avec les autres tâches, ils leur permettent d’améliorer le quotidien tout en continuant de s’occuper de la famille. Dès leur plus jeune âge, les enfants participent aux tâches. Les garçons sont utilisés pour les travaux de la terre et les filles en surnombre, « placées ». Elles deviennent domestiques, bonnes à tout faire ou nourrices. L’extrême pauvreté des ménages incite à délaisser les campagnes pour la ville où les possibilités de travail sont plus nombreuses. Les ateliers et manufactures textiles offrent bon nombre d’emplois aux femmes sans qualification. Après être travailleuses des champs, elles deviennent femmes-ouvrières.
La Fabrique lyonnaise est une organisation formée d’un chapelet de petites et grandes entreprises qui vont du dévidage des cocons de vers à soie jusqu’au tissage des délicats tissus de soie façonnés. A Lyon, dans les ateliers, les canuts tissent à façon, dépendent du marché et du bon-vouloir du fabricant. Le travail du canut et celui des ouvrières est dur. Flora Tristan dans son étude sur les conditions des ouvriers dénonce celles du canut « La Croix-Rousse, une vraie croix, où le pauvre prolétaire est crucifié vingt heures sur vingt-quatre ».
Etre ouvrier de la soie, avec un salaire trop bas, pour une alimentation insuffisante dans un environnement insalubre, et femme de surcroît, nous laisse imaginer les difficultés de la vie quotidienne de celles-ci. « Les tisserands travaillent chez eux sous la coupe d’entrepreneurs et ils ont eux-mêmes sous la coupe des dévideuses de trame ». ( Les femmes au travail- Charles-Roux, Ziegler, Cerati, Bruhat, Guilbert, Gilles)
ECHO FABRIQUE * 23 mars 1834 – Numéro 64
A Lyon.
Depuis long-temps** des plumes éloquentes, des cœurs généreux, plaident la cause des malheureux ouvriers de notre ville, mais excepté M. Jules Favre, personne n’a pensé au sort déplorable des femmes, des filles de la classe ouvrière, et par classe ouvrière, je n’entends pas seulement celle qui travaille sur le métier, mais aussi celle dont l’industrie se rattache directement ou indirectement à la fabrication des étoffes de soie ; de ce nombre sont les dévideuses, frangeuses, couseuses, découpeuses de schalls, etc., etc. Dans cette malheureuse et utile portion de la population de notre opulente cité, la misère et ses horreurs n’épargnent pas même l’enfance. – Dès l’âge de six ans une malheureuse petite fille est attelée à une roue de mécanique dix-huit heures par jour, elle gagne huit sous, en dépense deux, trois au plus, pour ajouter une insuffisante portion de mets grossiers à son pain plus grossier encore ; cette enfant étiolée par un travail au-dessus de ses forces, abrutie par une existence toute contre nature qui s’écoule dans des ateliers malsains, hideux de malpropreté, végète ainsi dans la plus déplorable ignorance. Si son enfance maladive échappe à tant de maux, elle atteint une jeunesse plus malheureuse encore. Réservée à la fabrication des étoffes unies (les plus mal rétribuées), une femme travaille quinze ou dix-huit heures, souvent les dimanches et fêtes, pour gagner un salaire qui suffit à peu près à la moitié de ses besoins les plus urgens. ..Restent alors celles qui se rattachent à la fabrique. Veut-elle dévider de la soie ? Il ne suffira pas, pour obtenir de l’ouvrage, de le bien exécuter et d’être d’une exacte probité, il faudra auparavant, à quelque titre que ce soit, être recommandée au commis qui tient la balance. Celui-ci, puissance secondaire, tient peu de compte des ordres du chef lui-même, ou s’il ne peut éluder l’injonction de donner de l’ouvrage à telle ouvrière qui n’a pas cherché sa protection, alors commence pour elle une suite de vexations qui finit par lasser la misère la plus patiente….
Jane Dubuisson. Rédactrice du « conseiller des femmes » hebdo 1832-1834 dirigée par E Niboyet
Le travail harassant, les longues journées de travail contraignent les ouvrières à se loger dans les dortoirs attenants à l’entreprise. Très répandus dans la ville au début de l’industrialisation, ces dortoirs sont décrits comme étant insalubres, sous les toits, sans air renouvelé, froid l’hiver et brûlant l’été. Les ouvrières entassées connaissent la promiscuité, le manque d’eau et d’hygiène.. »..Ces forçats féminins, après avoir rempli cette journée de labeur, sont réduits le soir à monter sous les combles des maisons qui leur servent d’ateliers, dans des chenils qui leurs servent de dortoirs. Là, elles trouvent un grabat dont le linge n’est changé que tous les trois mois et le plus souvent tous les six mois. Quant aux accessoires ils ne sont changés ou appropriés que lorsqu’on est obligé de les remplacer complètement. Tous les insectes de la création, pour me servir d’une expression vulgaire, habitent ces lieux infects, de sorte qu’après avoir épuisé leur corps en travaillant toute la journée pour entretenir le luxe des parasites, elles sont obligées de le donner la nuit, en pâture à la vermine !.. ***
Pour affronter la concurrence, et éloigner les ouvriers de la contestation urbaine, La Fabrique développe les usines hors de l’agglomération. L’usine regroupe plusieurs centaines d’ouvriers dont une majorité de femmes. Les ouvrières issues d’un milieu rural vivent dans un univers clos au règlement strict, et ne vivent que pour l’entreprise. Toutes les opérations de fabrication y sont intégrées. L’énergie des cours d’eau à proximité et l’abondante main d’œuvre, très jeune, « docile »et pas chère, offrent tous les avantages pour la prospérité de l’entreprise. , « l’ouvrière des montagnes est en général résignée, plus docile, moins exigeante que celle des plaines .. et aussi plus robuste »**** Encadrées par des religieuses, elles sont soumises à une discipline sévère où silence, travail et vertu sont les critères de bonne moralité. Elles sont les futures « bonnes mères » et épouses accomplies. Quand le marché est conclu entre les parents et l’entreprise, il repose souvent sur la substitution du père par le patron, dans la formation et l’éducation et aussi dans sa dot. La jeune fille ne perçoit pas de salaire mais une dot à sa sortie, de laquelle on soustrait les quelques sous d’argent de poche, les dégradations, les vols… Les règlements, bien que similaires, varient dans certains détails suivant les établissements.
Une des premières usines-pensionnats de la région lyonnaise est la fabrique de châles de la Sauvagère à Saint-Rambert, Elle sert de modèle aux autres usines « les jeunes filles avaient leur dortoir et chacune d’elles avait son lit, ce qui représentait un progrès notable par rapport au lit étroit que devaient se partager deux ouvrières dans les ateliers de Lyon »
D’autres se créent dont celles de Auger et Gindre à Boussieu et rue Hénon , celle du fabricant Cl.J.Bonnet, installée à Jujurieux. La mécanisation est en marche, l’usine prend des allures de monstre. Les petites mains, les unes à côté des autres, s’activent à des rythmes endiablés pour le nourrir. La main d’œuvre féminine, plutôt orpheline voire sourde et muette est recrutée dans les campagnes défavorisées, souvent vers 12 ans pour des journées de 10h par jour, 2h de plus pour les plus âgées. Corvéables à merci.
Les Soieries C.J. Bonnet à Jujurieux, vue de l’usine pensionnat vers 1870, aquarelle, anonyme.
© coll. Conservation départementale des Musées de l’Ain /J. Alves
« L’usine pensionnat de Jujurieux va devenir la grande oeuvre philanthropique de Claude‐Joseph Bonnet. Elle synthétise sa volonté d’organiser le monde à sa manière. Tout comme ses affaires, il dirige la vie de ses employés de Jujurieux. Claude‐Joseph Bonnet est une figure emblématique du
catholicisme militant. La présence des religieux dans l’usine est pour lui une évidence. L’action du
patron se confond avec une volonté d’éducation, il s’estime responsable moral des pensionnaires, de formation et d’instruction religieuse. En même temps, il dispose par ce biais d’une main d’oeuvre servile et dévouée qui lui permettra de s’enrichir rapidement. « Chrétien
convaincu, il croyait pouvoir concilier l’idée religieuse et l’idée commerciale et favoriser la
régénération des campagnes »L’usine de Jujurieux compte 600 jeunes filles mineures dont 1/6e sont des enfants trouvés à Lyon. » Stéphane Autran 2011
L USINE PENSIONNAT DE BOUSSIEU
La loi du 22 mars 1841 autorisait les employeurs à embaucher des enfants à partir de l’âge de 8 ans ; il semble qu’Auger ait préféré les embaucher à partir de 12 ans, une fois leur communion faite et les obligations scolaires accomplies. Dans les archives, on trouve à Boussieu un seul cas d’infraction à la législation qui avait été modifiée par la loi du 19 mai 1874 limitant la durée du travail des mineurs. L’inspecteur d’académie signale le 7 juin 1880, le cas d’une jeune fille – Marie Drevet – âgée de 10 ans qui travaille plus de 6 heures par jour et ne possède toujours pas le certificat d’études… La grande majorité des ouvrières sont étrangères à la localité. Celles qui habitent les environs arrivent dans de grandes voitures tirées par des chevaux, qu’elles appelaient des « galères », le dimanche soir ou le lundi matin. Mais les ardéchoises ou les savoyardes peuvent rester 6 mois sans retourner chez elles. Quant aux Italiennes, il arrive qu’elles ne puissent pas repartir, faute d’argent pour se payer le voyage… Elles sont recrutées comme apprenties pour une durée de 4 ans et ne touchent aucun salaire mais une dot leur était remise après leur départ. Si la jeune fille avait eu de nombreuses amendes, elle devait effectuer une nouvelle période pour payer sa dette. D’une manière générale les ouvrières du textile étaient parmi les moins bien payées. Vers 1880, le salaire moyen d’une tisseuse est de 1,70 francs par jour, alors que le kilo de pain coûte 0,36 francs et les pommes de terre 5,60 francs le kilo. Dans les usines-pensionnats la rémunération globale était encore plus faible. A Boussieu, elles étaient nourries, blanchies et logées. Au bout de 4 ans la dot pouvait s’élever à 150 francs (une ouvrière gagnait en moyenne dans l’Isère environ 500 francs par an). Elles dormaient dans un espace encombré, mal aéré, où elles couchaient le plus souvent à 2 dans un même lit et où la tuberculose faisait des ravages comme en témoigne un inspecteur du travail qui insiste sur la nécessité de balayer et mouiller les ateliers en dehors des heures de travail et d’installer des crachoirs.
La journée de travail est longue : 14 heures jusqu’en 1870 puis 12 heures et enfin 10 heures à partir de 1904. Ces horaires sont appliqués du lundi au samedi. Dans les ateliers les conditions de travail sont très pénibles à cause du bruit et de la poussière. Dans l’atelier de moulinage il est important pour le bon déroulement de l’opération que le taux d’humidité relative soit de 90 % et la température supérieure à 24 degrés. Le taux d’humidité devait être également élevé dans l’atelier de tissage afin que les fils ne cassent pas. L’inspecteur du travail, cité plus haut, déplore qu’aucune mesure ne soit prise contre les risques de saut de navette. Cet outil provoquait fréquemment des accidents en s’échappant du métier en marche et frappant les tisseuses au visage.
Un contemporain Justin Godard, dans un livre intitulé « Travailleurs et Métiers lyonnais » paru à Lyon en 1909 a décrit la vie de ces jeunes filles et jeunes femmes, rythmé par le « son de la cloche » et le « hurlement de la sirène ». Il a dénoncé la promiscuité, le manque d’hygiène, et fustigé la violation de la liberté de conscience. Il est interdit de parler durant les heures de travail ; la discipline qui règne est extrêmement stricte pour le moins que l’on puisse dire et la presse socialiste n’hésite pas à parler de « bagne capitaliste ». –site OFFICIEL DE LA COMMUNE de Nivolas-Vermelle
En continuant les recherches sur la condition des femmes, on trouve des écrits, des considérations, des analyses nombreuses sur le sujet. Le XIXe siècle est riche en revendications. Les canuts luttent pour le prix de façon, créent les premiers syndicats et caisses de solidarité. Quelques femmes osent aussi revendiquer leur droit au travail. Elles ne demandent pas l’égalité avec les hommes, pas encore, mais seulement une rémunération supplémentaire pour pouvoir se loger hors de l’usine où les conditions d’embrigadement sont souvent infernales. C’est le cas des ovalistes. À Lyon, durant l’été 1869, 250 ouvrières ovalistes se mettent en grève pour demander une augmentation de leur salaire et une diminution de leur temps de travail. Ce sont des ouvrières de la soie dont le travail consiste à appliquer des traitements préparatoires au fil de soie grège au sortir de la filature, afin de le rendre propre au tissage (l’ovale étant la pièce centrale du moulin qu’elles surveillaient). Cette activité s’appelle également le moulinage. Ces ouvrières sont recrutées dans les campagnes voisines de Lyon, payées 1,40 francs la journée de 12 heures, et logées dans des chambres souvent insalubres, surpeuplées et sans eau. Après plusieurs semaines de lutte, seule une diminution du temps de travail leur est accordée soit 10h au lieu de 12, mais aucune augmentation de salaire leur permettant de trouver un logement autre.
LA GREVE DES OVALISTES
Avant 1848, en France, les malheureuses assujetties à cette industrie meurtrière, travaillaient, dans les villes seize heures par jour, à 1 fr. 25 environ. Dans les campagnes où aucune police ne surveillait la cupidité des patrons, elles travaillaient dix-sept heures, et les meilleures ouvrières gagnaient de 18 à 25 fr. par mois. Ce n’est pas tout, pour complaire à son patron, le garde-chiourme de ces bagnes inavoués, ou, si l’on veut, le contremaître, trouvait encore le moyen, par des manoeuvres infernales, de leur voler deux heures par jour, ce qui, tout compte fait, portait la journée à 18 et 19 heures! Et pour pousser l’abomination à son comble, on rencontrait, et on rencontre encore, de jeunes ouvrières de 9, 10 et 11 ans!… Que l’on vienne nous dire encore après cela que nous vivons sous des gouvernements libéraux! Que l’on vienne nous dire encore que les commerçants et les industriels qui accaparent les millions au prix de tant d’atrocités sont d’honnêtes gens! Un homme qui, dans un mouvement de colère, portera à son semblable, un coup pouvant porter atteinte à sa santé ou à sa vie, sera traduit devant les tribunaux, condamné comme un misérable dangereux pour la société, et ce sera justice; et tous ces vampires qui se vautrent dans un luxe insultant, et qui, de propos délibéré, assassinent indirectement des milliers de producteurs, passeraient impunément pour d’honorables citoyens ! Mais alors, logique, où es-tu ?
En 1848, une grève éclata, de justes réclamations se firent entendre, et après quelques jours de lutte, la journée fut réduite de deux heures pour les ouvriers de Lyon. Cette nouvelle condition a duré jusqu’au commencement de juillet 1869, époque à laquelle de nouvelles réclamations ont été adressées aux patrons. Après un mois ou cinq semaines de lutte, la grève s’est terminée par une diminution de travail de deux heures. Bref, on en est arrivé à obtenir de ne travailler que 10 heures par jour. Quant au prix de la journée, il est resté à peu près ce qu’il était avant la grève.
Quelques jours de prison pour les unes, quelques jours de famine pour beaucoup d’autres, tel a été le prix auquel s’est faite cette conquête. Palix. Association Internationale des Travailleurs-1869
Echo de La Fabrique Numéro 15 -5 février 1832 –
Il entre, année commune, à l’Hôtel-Dieu de Lyon, 15.000 malades, tant de Lyon que des dix-sept départemens environnans. Sur ce nombre, les ouvriers en soie de Lyon et des faubourgs, en fournissent, année commune, 3 mille, dont un peu plus de la moitié en femmes, et la mortalité est du dixième.
Ainsi, on peut calculer qu’il meurt par an 300 ouvriers en soie à l’Hôtel-Dieu, et que cette classe forme un 5me des malades.
Dans une salle de femmes, sur 1.217 entrées l’année dernière, il y a eu 502 ouvrières en soie.
LES NOURRICES A LYON AU XIXE
La mise en nourrice des enfants à la naissance est une pratique courante. « l’allaitement des nouveaux nés par une personne requise à cet effet » a toujours existé. Signe extérieur de richesse ou nécessité, toutes les classes de la société y recourent.
La mortalité infantile très élevée est due aux mauvaises conditions de transport ( froid, entassement) aux nourrices qui allaitent plusieurs enfants et qui ont recourt au lait d’animaux et aux bouillies inadaptées au nourrisson, au manque d’hygiène, au manque de surveillance…
A Lyon ville industrielle, plus de la moitié des enfants nés à Lyon sont confiés à des nourrices « à emporter ». Plus les ménages sont pauvres, plus la nourrice est éloignée.
La situation à Lyon au XIXe siècle.
Lyon est un cas particulier. Ville industrielle, elle se distingue des autres villes françaises. L’allaitement mercenaire y est très ancien (dès le XVIIe siècle) et touche presque toutes les classes sociales. Cette pratique, ailleurs réservée aux classes aisées de la population urbaine, est ici observable dans les familles bourgeoises comme dans celles d’artisans (bouchers ou menuisiers) ; mais aussi chez les ouvriers et ouvrières en soie. Les raisons qui les poussent à envoyer leurs enfants à la campagne ne sont bien évidemment pas les mêmes. Pour les familles aisées « ne pas nourrir est la marque d’un rang social élevé ». Quant aux femmes d’artisans, elles travaillent près de leurs maris ou dans la boutique et ne peuvent s’occuper des enfants. Tout comme les femmes de canuts. Il y a un lien entre travail de la femme et mise en nourrice : la nouvelle dynastie industrielle des Gillet dans la première moitié du XIXe siècle, en est un bon exemple : « François et son épouse travaillent beaucoup. Et le couple doit mettre ses enfants en nourrice. » A la génération suivante, les femmes ne travaillent plus et les enfants restent au foyer. Joséphine, l’épouse d’Antoine Lumière aide son mari à l’atelier de photographie puis à l’usine de Montplaisir, comme le raconte leur fils Auguste Lumière. Ce n’est pas l’obligation de travailler qui pousse la bourgeoise lyonnaise à mettre son enfant en nourrice. Il faut au préalable, faire remarquer que la bourgeoisie lyonnaise est catholique et très féconde. Cela a un impact sur ces questions dites de nourrissage. Les dames de la bonne bourgeoisie lyonnaise nourrissent quand elles le peuvent. Mais fatiguées par des grossesses rapprochées, nombre d’entre elles y renoncent à partir du troisième ou du quatrième enfant. Et les médecins les encouragent dans ce sens. On sait que le malthusianisme bourgeois qui sévit à Paris au XIXe siècle ne se retrouve pas à Lyon. Il n’est pas rare de voir des familles de dix ou douze enfants. La fertilité est une tradition familiale qui s’explique par la religion et la nécessité de l’avenir dynastique.
. Emmanuelle ROMANET Docteur en histoire, Université Jean Moulin Lyon 3 »La mise en nourrice, une pratique répandue en France au XIXe »
« Historiquement et dans la plupart des sociétés, les hommes ont pris prétexte de la nature féminine pour interdire aux femmes les activités publiques en réduisant leur domaine à l’espace domestique. En Europe en général et en France en particulier, la modernité, introduite à l’époque des Lumières, a ouvert la voie à l’esprit de liberté auquel pouvait aspirer tout individu (homme ou femme). En France, les autorités ont décidé d’interdire légalement l’accès à la liberté des femmes par la législation en promouvant le Code civil en 1804, dont le modèle servira d’exemple à d’autres pays européens. Les femmes sont alors mises sous la tutelle du père puis du mari. Ce n’est qu’en 1965 que les femmes peuvent choisir librement de travailler sans l’autorisation de l’époux »
Michele Riot-Sarcey Historienne Professeure à l’Université Paris VIII
*L’ Echo de La Fabrique est un hebdomadaire publié de 1831à 1834 par les ouvriers en soie de Lyon – numéros en ligne sur le site de BM Lyon
**l’orthographe est celle de l’auteur
***. Lyon, le 3 septembre 1869. L. Palix tailleur, direction AIT (association internationale des travailleurs): comité exécutif, rédaction et correspondance
**** Abel.Chatelain Les migrants temporaires en France de 1800 à 1914
Sources
Claire Auzias, La Grève des ovalistes : Lyon, juin-juillet 1869
ROJON l’industrialisation du Bas-Dauphiné : le cas du textile (fin XVIIIe siècle à 1914)-Thèse 2007 université Lumière
La vie quotidienne des canuts- B.Plessis L.Chatel
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13 décembre 2014
Merci pour cet article, mais c’est dommage de ne pas citer les sources complètement.
Auzias, Claire, Houel, Annik (1982). La grève des ovalistes: Lyon, juin-juillet 1869. Paris: Payot.
http://raforum.info/spip.php?article2070&lang=en
31 janvier 2015
Les ouvrières en question étaient issues de familles d’une extrême pauvreté, vivant dans des conditions moyenâgeuses à la limite de la survie. Les filles en surnombre ou défavorisées ont trouvé dans l’usine mécanisée, certes de longues journées mais conformes à celle de leur patron et pour un travail peu difficile; elles recevaient dans les usines-pensionnat une éducation, un logement et un salaire qu’elles n’avaient pas à dépenser qui leur a permis:
– de quitter l’usine avec une dot
– de quitter l’environnement familial et la tyrannie masculine qui y régnait
– de quitter un logement insalubre où elles partageaient leur lit pour des dortoirs visités par des inspecteurs du travail et des journalistes
– de recevoir une instruction et une éducation
– d’influer sur le choix de leur mari au lieu d’être mariée de force
– de reculer l’âge de leur mariage et donc le nombre de leurs enfants d’une dizaine à deux ou trois
-d’augmenter leur espérance de vie de manière considérable par l’accès aux soins et aux premières œuvres sociales mises en œuvres par le patronat et les syndicats
– d’avoir des enfants qui ont pu recevoir une éducation et devenir médecin ou fonctionnaire au lieu de finir paysan-ouvrier misérable et analphabètes comme leurs ancêtres.
– d’acquérir auprès des autres filles une conscience « de classe ».
Au total, la chance de la région lyonnaise, stéphanoise ou du bas Dauphiné a été que des hommes nés avant la Révolution, les sabots au pieds, aient trouvé l’énergie de créer des manufactures exportatrice au prix d’un incroyable travail d’entrepreneur (tout à la fois mécanicien-dessinateur-exportateur etc.), bien loin de l’oisiveté faussement décrite dans cet article ; oisiveté qui était par contre celle des fonctionnaires d’ancien régime puis de la monarchie ou du deuxième Empire puisque la Révolution Industrielle a eu lieu en France avant l’Instauration définitive de la République.
Rappelons que ce sont les fonctionnaires (noblesse ancienne ou récente) et l’Eglise qui touchaient les revenus de prélèvements exorbitants sur les ouvriers-paysans attachés à leurs possessions terriennes et non les entrepreneurs qui devaient économiser longtemps avant de pouvoir leur racheter quelques ha pour y construire des usines.
Usines qui ont permis à des paysans-ouvriers misérables de sortir enfin de leur condition.
Comme l’écrit Thomas Piketty dans « Le capital au XXIème siècle »
« Que sait-on réellement de l’évolution de la répartition des revenus et des patrimoines depuis le XVIIIe siècle, et quelles leçons peut-on en tirer pour le XXIe ?
Telles sont les questions auxquelles je tente de répondre dans ce livre. Disons-le d’emblée : les réponses apportées sont imparfaites et incomplètes. Mais elles se fondent sur des données historiques et comparatives beaucoup plus étendues que tous les travaux antérieurs, portant sur trois siècles et plus de vingt pays, et sur un cadre théorique renouvelé permettant de mieux comprendre les tendances et les mécanismes à l’œuvre. La croissance moderne et la diffusion des connaissances ont permis d’éviter l’apocalypse marxiste… ».
Car en effet, sans ces entrepreneurs, la France aurait sans doute connu l’horreur maoïste ou léniniste et, comme en Chine, c’est au 21ème siècle seulement et non au 19ème que des paysannes ouvrières seraient en usine-pensionnat comme en Chine en 2015.
29 novembre 2017
Jeudi l’HISTOIRE
Le travail des enfants
Le premier essai d’installation d’une filature de laine à Bourgoin est à mettre à l’actif des drapiers viennois, les frères Charvet, en 1769. Des débuts industriels qui auraient pu réussir mais ce filage, employant de nombreux enfants, fut contraint de fermer.
Au milieu du XIXème siècle en Isère, chez les papetiers, la durée du travail varie de 10 à 12h et les salaires vont du simple au double : 1,50f à 2f pour les hommes, et la moitié pour les femmes. Les enfants en bas âge gagnent à peine leur nourriture. A Bourgoin, en 1864, les fileurs « sont présents treize heures par jour devant leur métier ».
Le rapport sur le travail des enfants à Bourgoin et Jallieu, en date du 25 août 1854 par l’Inspecteur Bouvier, est accablant. Les enfants y sont très jeunes et travaillent plus de 12 heures par jour, sans instruction, et sans que cela paraisse abusif ! Pour leur maigre repas, ils ne disposent que d’une heure de pause.
« Monsieur Perregaux occupe, en moyenne, 70 enfants de 8 à 16 ans dans sa manufacture. 15 enfants âgés de moins de 8 ans sont employés à transporter des couleurs dans de petits vases. Ce travail qui n’a pas de continuité ne peut compromettre leur santé. Il n’y a pas de travail de nuit pour les enfants, leur journée commence à 5 heures du matin et finit à 7 heures du soir avec deux intervalles de 1 heure chaque jour pour les repas. Leur travail consiste à étendre des couleurs sur un châssis, opération du tireur, en terme d’art, qui n’est pas pénible. (…) Monsieur Perregaux paie l’instituteur communal pour faire l’école à ses ouvriers de 8 à 12 ans, mais ces enfants ne veulent la suivre que pendant 8 mois de l’année. »
Des conditions qui ne cessent de se dégrader dans les usine-pensionnats qui se créent entre 1885 et 1900. On y trouve 20% d’enfants travaillant en 1872. Usiniers et parents sont demandeurs voire souvent complices pour détourner la loi. En
Chez L. Perrégaux et Théophile Diederichs, fin des années 1870, en moyenne, un enfant gagne 80 centimes par jour et une femme 2 francs.
Deux décrets, celui du 27 mars 1875 et celui du 1er mars 1877, permet à l’industrie textile d’ employer des enfants âgés dès l’âge de 10 ans . Et ce, jusqu’au vote de la loi Ferry de 1882 sur la scolarité obligatoire
En 1889, l’écart s’est réduit – un enfant reçoit 1,50 francs par jour contre 2,50 francs pour une femme .
1892, 515 jeunes filles, presque toutes encore des enfants, sont recensées dans les usines-pensionnat du pays berjallien. Et ce, dans de mauvaises conditions de travail (hygiène, promiscuité, salaires, nourriture…). Peu de personnes s’émeuvent de la vie de cette main-d’œuvre docile à qui certaines institutions promettent presque le paradis afin de les placer dans ces usines-couvents de l’industrie de la soie !
Des sirènes qui seront bien vite remplacées par d’autres sons de cloches comme celles de la manufacture de M. Auger à Boussieu. Les jeunes filles sont affectées au moulinage, canetage, dévidage, ourdissage ou tissage (de la soie exclusivement). Les jeunes filles de plus de 13 ans travaillent 12 heures par jour, les autres, plus jeunes, 11 heures !
Alain THORAND (Le Dauphiné Libéré)
29 novembre 2017
Jeudi l’HISTOIRE
Le travail des enfants
Le premier essai d’installation d’une filature de laine à Bourgoin est à mettre à l’actif des drapiers viennois, les frères Charvet, en 1769. Des débuts industriels qui auraient pu réussir mais ce filage, employant de nombreux enfants, fut contraint de fermer.
Au milieu du XIXème siècle en Isère, chez les papetiers, la durée du travail varie de 10 à 12h et les salaires vont du simple au double : 1,50f à 2f pour les hommes, et la moitié pour les femmes. Les enfants en bas âge gagnent à peine leur nourriture. A Bourgoin, en 1864, les fileurs « sont présents treize heures par jour devant leur métier ».
Le rapport sur le travail des enfants à Bourgoin et Jallieu, en date du 25 août 1854 par l’Inspecteur Bouvier, est accablant. Les enfants y sont très jeunes et travaillent plus de 12 heures par jour, sans instruction, et sans que cela paraisse abusif ! Pour leur maigre repas, ils ne disposent que d’une heure de pause.
« Monsieur Perregaux occupe, en moyenne, 70 enfants de 8 à 16 ans dans sa manufacture. 15 enfants âgés de moins de 8 ans sont employés à transporter des couleurs dans de petits vases. Ce travail qui n’a pas de continuité ne peut compromettre leur santé. Il n’y a pas de travail de nuit pour les enfants, leur journée commence à 5 heures du matin et finit à 7 heures du soir avec deux intervalles de 1 heure chaque jour pour les repas. Leur travail consiste à étendre des couleurs sur un châssis, opération du tireur, en terme d’art, qui n’est pas pénible. (…) Monsieur Perregaux paie l’instituteur communal pour faire l’école à ses ouvriers de 8 à 12 ans, mais ces enfants ne veulent la suivre que pendant 8 mois de l’année. »
Des conditions qui ne cessent de se dégrader dans les usine-pensionnats qui se créent entre 1885 et 1900. On y trouve 20% d’enfants travaillant en 1872. Usiniers et parents sont demandeurs voire souvent complices pour détourner la loi. En
Chez L. Perrégaux et Théophile Diederichs, fin des années 1870, en moyenne, un enfant gagne 80 centimes par jour et une femme 2 francs.
Deux décrets, celui du 27 mars 1875 et celui du 1er mars 1877, permet à l’industrie textile d’ employer des enfants âgés dès l’âge de 10 ans . Et ce, jusqu’au vote de la loi Ferry de 1882 sur la scolarité obligatoire
En 1889, l’écart s’est réduit – un enfant reçoit 1,50 francs par jour contre 2,50 francs pour une femme .
1892, 515 jeunes filles, presque toutes encore des enfants, sont recensées dans les usines-pensionnat du pays berjallien. Et ce, dans de mauvaises conditions de travail (hygiène, promiscuité, salaires, nourriture…). Peu de personnes s’émeuvent de la vie de cette main-d’œuvre docile à qui certaines institutions promettent presque le paradis afin de les placer dans ces usines-couvents de l’industrie de la soie !
Des sirènes qui seront bien vite remplacées par d’autres sons de cloches comme celles de la manufacture de M. Auger à Boussieu. Les jeunes filles sont affectées au moulinage, canetage, dévidage, ourdissage ou tissage (de la soie exclusivement). Les jeunes filles de plus de 13 ans travaillent 12 heures par jour, les autres, plus jeunes, 11 heures !
Alain THORAND
25 janvier 2018
Jolie article, bravo. C’est très intéressant!
🙂